Biodiversité et pandémies : quelles priorités de recherche et d'actions ?

Un rapport de synthèse des connaissances sur la biodiversité et les pandémies, élaboré par un groupe de 9 experts internationaux, dont Alexandre CARON, UMR ASTRE du Cirad, vient d'être publié par Eklipse. Il formule quatre recommandations pour l'élaboration de programmes de recherche à l’interface entre santé humaine, animale et des écosystèmes.

Mieux comprendre et gérer le phénomène de saut d’espèce ou « spillover »

Qui qualifie le passage d’un agent pathogène d’une espèce à une autre est essentiel pour prévenir et contrôler les épidémies, voire les pandémies, mais aussi les panzooties dans les élevages et les risques sur la santé des animaux sauvages. C’est l’un des principaux défis à relever pour les scientifiques d'après ce rapport. Ces phénomènes se produisent aux interfaces entre faune sauvage, animaux domestiques et populations humaines, qui sont en constante évolution. Pour les étudier, les experts recommandent une approche interdisciplinaire, mêlant sciences naturelles et sociales. Ils soulignent également l'implication essentielle des populations locales comme un élément clé pour formuler des politiques de prévention et de préparation aux pandémies.

Les principales questions aux interfaces entre faune sauvage, animaux domestiques et populations humaines qui nécessitent de nouvelles recherches sont les suivantes :

  1. Comment les populations hôtes et non hôtes s'adaptent à l'évolution des interfaces ;
  2. Quelles sont les conséquences des changements à l'interface entre faune sauvage, animaux domestiques et populations humaines (W/D/H) sur les dynamiques épidémiologiques des agents pathogènes, y compris la capacité des agents pathogènes à évoluer et à franchir les barrières entre les espèces ; 
  3. Quel est le risque de propagation aux interfaces W/D/H, y compris les facteurs économiques, sociaux et culturels passés et présents des interactions homme-animal qui augmentent le risque de propagation d'agents pathogènes zoonotiques ;
  4. Comment évaluer le potentiel pandémique d'un événement de dissémination donné ;
  5. Comment évaluer de manière simultanée des processus à plusieurs échelles spatiales afin de comprendre les menaces émergentes et leurs caractéristiques lors du passage d'une échelle à l'autre ;
  6. Développer des outils de diagnostic et une gestion intégrée des données relatives aux agents pathogènes potentiels transportés par la faune.

Le rapport est issu d'une requête de besoin de connaissances, présentée à Eklipse, par plusieurs directions de la Commission européenne ainsi que l’OHHLEP, PREZODE notamment et suivie par un consortium intersectoriel de scientifiques dans les domaines des sciences naturelles, biomédicales et sociales. Ces recommandations alimenteront la définition des prochains appels d’offre de l’Union Européenne sur la thématique.

"Identifier les lacunes dans les connaissances en matière de lien entre biodiversité et pandémies et en tirer des recommandations a été une tâche très stimulante pour notre groupe de travail Eklipse. Il remet en question notre relation avec la nature et certains des piliers de nos sociétés et modes de vie actuels". Alexandre CARON, Ecologue de la santé au Cirad.

Eklipse

A été créé en 2016 pour aider les gouvernements, les institutions, les entreprises et les ONG à prendre des décisions éclairées. Eklipse est reconnu par la Commission européenne comme en tant que pilier scientifique du Centre de connaissances sur la biodiversité (EC-KCBD). Depuis 2022, Eklipse est géré par l'organisation à but non lucratif Alternet.

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(Article du Cirad Communication du 07/12/2023)

Publiée : 10/12/2023