La spectrométrie de masse au service du contrôle qualité des vaccins

François Thiaucourt, chercheur de l'unité et des chercheurs du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) et du centre de vaccination vétérinaire africain (AU-PANVAC) proposent l’utilisation de la spectrométrie de masse pour le contrôle de la qualité des vaccins, illustrée ici dans le cadre de la pleuropneumonie contagieuse caprine.

La pleuropneumonie contagieuse caprine est une maladie infectieuse et contagieuse qui sévit en Afrique et en Asie, du Niger jusqu’à la Chine. Elle affecte les chèvres mais aussi de nombreuses espèces de ruminants sauvages. Il existe des vaccins efficaces mais, en pratique, ceux qui sont disponibles sur le terrain n’induisent pas toujours la protection attendue.  La spectrophotométrie de masse devient une piste sérieuse pour le contrôle de la qualité des vaccins.

La qualité de certains lots de vaccins mise en doute après l’infection d’un troupeau

La pleuropneumonie contagieuse caprine (PPCC) a récemment affecté un troupeau de gazelles à goitre aux Émirats Arabes Unis entrainant une mortalité de près de 70% (Lignereux et al., 2018). Les vaccins disponibles localement n’ont pas induit la réponse sérologique attendue, ce qui a jeté un doute sur leur qualité.

Analyse protéique des vaccins par spectrométrie de masse

Pour tester la qualité de ce type de vaccin, le Laboratoire Innovations technologiques pour la Détection et le Diagnostic (LI2D) du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) a utilisé la technique de spectrométrie de masse en tandem ("Improving quality control of Contagious Caprine Pleuropneumonia vaccine with tandem mass spectrometry", F. Thiaucourt et al., 2018). Elle permet d’identifier les protéines présentes dans les vaccins et de les comparer avec celles présentes dans les vaccins produits conformément aux normes de l’Organisation Mondiale de la Santé Animale (OIE).

"L’originalité de la méthode repose sur l’utilisation de la puissance de la spectrométrie de masse en tandem à très haute résolution et l’interprétation des données. Une base de données dédiée prend en compte les mycoplasmes potentiellement présents et les protéines de l’hôte utilisées lors de la production des vaccins. Le typage de la sous-espèce de mycoplasme et l’évaluation des quantités relatives d’antigène et de protéines contaminantes sont rendus possible grâce à cette base de données", précise Jean Armengaud du Laboratoire Innovations technologiques pour la Détection et le Diagnostic.

Après analyse, la composition des vaccins commerciaux testés ne correspondait pas aux standards de qualité. Une quantité anormalement élevée de protéines non-antigéniques a été détectée et leur nature identifiée.

La spectrométrie de masse, nouvel outil pour le contrôle qualité des vaccins

La spectrométrie de masse est une technique sans aucun « a priori » et peut s’appliquer à tout type de vaccin. Elle peut également s’appliquer à des vaccins inactivés dont la qualité ne peut pas être évaluée en remettant en culture les souches présentes. Les applications de cette technique sont donc potentiellement très vastes.

Sensibiliser et améliorer les vaccins pour lutter efficacement

Le AU-PANVAC, le CEA et le Cirad unissent leurs efforts pour sensibiliser les producteurs de vaccins « PPCC » et améliorer les produits proposés pour in fine lutter efficacement contre une maladie qui touche prioritairement les éleveurs de chèvre dans des régions défavorisées. L’amélioration de ces vaccins devrait permettre de diminuer l’impact de la PPCC et indirectement limiter l’utilisation des antibiotiques.

Photo : Une chèvre, lors de l'introduction de la PPCC, sans doute en provenance de Somalie, entrainant des mortalités de plus de 50% dans les troupeaux touchés (Éthiopie, 1990). © F. Thiaucourt

Publiée : 22/06/2018